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jeudi 28 juin 2012

La réforme du Conseil de la Fédération: entre élections et neutralité

Voir: http://pravo.ru/news/view/74252/

Hier, à la surprise des sénateurs qui n'avaient pas vu de Président dans leurs murs depuis 2001, est apparu V. Poutine. L'occasion était belle, il venait de signer et de déposer à la Douma un projet de loi portant réforme de la composition du Conseil de la Fédération.

S'appuyant sur les nouveaux procédés d'élections au suffrage universel direct des gouverneurs, les sénateurs doivent s'inscrire dans ce processus électoral. Ainsi, un candidat au poste de gouverneur présentera, lors de sa campagne électorale, une liste de trois noms de sénateurs potentiels, faisant partie de son équipe, dont il en nommera obligatoirement un en cas de victoire. De cette manière, les sénateurs bénéficieront indirectement de l'onction électorale et la parole sera rendue au bon peuple.

L'idée d'une élection indirecte des sénateurs n'est en soi pas mauvaise. Mais si l'on revient à la réalité politique, les conséquences sont évidentes. La plupart des gouverneurs seront issus du parti Edinaya Rossiya en raison des barrières prévues pour les élections régionales. De cette manière, l'opposition est a priori écartée puisque les assemblée locales, où quelques représentants de l'opposition sont présents, perdront tout pouvoir de s'exprimer. Les sénateurs seront donc le résultat du choix du Parti. Ce qui est amusant quand V. Poutine affirme avec force que les sénateurs ne doivent pas représenter un parti politique, ne doivent donc pas avoir la possibilité de constituer de fraction politique au sein du Conseil de la Fédération. Par le biais du mythe de la représentation strictement régionale, il serait donc possible de poser un voile délicat sur le monopole politique.

Le point positif, toutefois, réside en la mise en place d'un instrument qui pourra réellement servir lorsque, un jour, Edinaya Rossya ne sera plus en position de quasi monopole de fait. Mais il va encore falloir attendre.

Autre modification, leurs fonctions ne pourront plus être suspendues par une décision des assemblées locales - puisqu'elles perdent leurs pouvoirs en matière de nomination, elles le perdent également en matière de sanction - ni sur l'initiative du gouverneur. Ces sénateurs deviennent donc, dans la réalité, totalement incontrôlables. Et l'hypothétique contrôle populaire étant complètement utopique, des dérives sont à attendre.

Sur le plan démagogique, l'âge minimal permettant d'accéder aux fonctions de sénateur est abaissé à 21 ans. Pour que la Chambre haute devienne, selon les mots de Matvienko sa présidente, une Chambre de toutes les possibilités pour la jeunesse.

Non seulement cette réforme risque de rompre un certain équilibre institutionnel "classique" entre la Chambre basse et la Chambre haute, mais elle s'appuie sur des mécanismes électifs qui, pour l'instant, ne fonctionnent pas, ce qui ne permettra que le renforcement de la position de Edinaya Rossiya sous couvert de neutralité politique.  Il faudra de toute manière voir de quelle manière le texte sera modifier lors de son examen.

mercredi 27 juin 2012

Le ministre de la défense sous les tirs croisés de Medvedev et de Choïgu

Voir: http://izvestia.ru/news/528626

L'année dernière, une loi fédérale a été adoptée prévoyant le tranfert sans compensation des propriétés non utilisées à des fins militaires par le Ministère de la défense aux municipalités et régions, le tout avec le financement nécessaire à leur entretien pour une année. Cela concerne environ 1500 ensembles qui ressemblent à de petits bourgs, mais dans un état de délabrement avancé.

Sous l'impulsion de S. Choïgu, maintenant gouverneur de la région de Moscou, une réunion a été organisée. Le gouverneur a montré, en exemple, un de ces bourgs, où les bâtiments tombent en ruine sous les yeux de leurs habitants, où les infrastructures sont à l'abandon et les services publics quasi inexistants. Rien que dans la région de Moscou, environ 250 000 personnes vivent dans ces conditions.

Pour se défendre, le ministre de la défense avance un déficit de 70 milliards de rouble, le budget attribué à l'entretien de ces propriétés est déjà dépensé et il ne reste rien. Or, la loi prévoit le transfert des biens avec les moyens financiers. Le ministre est bloqué, il ne peut pas transférer un déficit.

Le Premier ministre et Choïgu l'accusent presque publiquement d'incompétence et il se trouve aujourd'hui à la limite d'une sanction.

La question est très importante, surtout pour la région de Moscou. En effet, le transfert de ces anciennes "villes militaires" se fait avec le transfert de la propriété du sol aux régions. Or, la terre dans les environs de Moscou coûte très cher. L'enjeu est donc de taille!


mardi 26 juin 2012

Les élections des gouverneurs se passeront selon le scénario prévu: sans alternative

Voir: http://www.kommersant.ru/doc/1966431

Malgré l'adoption de la loi sur les partis politiques, malgré la réforme des élections des gouverneurs au suffrage universel direct, rien de fondamental ne changera. Et c'est bien ce qui était prévu, si l'on oublie un instant la démagogie ambiante.

Dans les régions où ces élections doivent avoir lieu, seul le parti communiste est à même de promouvoir parfois des candidatures autonomes, Spravedlivaya Rossiya doit conclure des accords de coalition, LDPR refuse de se prononcer, quant aux partis libéraux, il n'est même pas nécessaire d'en parler. Bien sûr, Edinaya Rossiya avance la possibilité pour ces partis de contacter les députés indépendants, mais qui sont, comme chacun le sait parfaitement, sous contrôle des administrations locales. Résultats, les candidats aux élections des postes de gouverneur ne peuvent être présentés sans la signature de députés d'Edinaya Rossiya, donc sans l'accord du pouvoir.

Belle avancée en matière de démocratie locale!

La raison principale de ce blocage vient de l'existence des filtres locaux, obligeant les candidats potentiels à réunir un certain pourcentage de signatures d'élus locaux. Dans l'Oblast de Novgorod, il est de 10%, dans celui d'Amourskaya il est de 7% et de 5% à Belgorod. Or, en moyenne, Edinaya Rossiya a environ 62% d'élus locaux, pour 30% d'indépendants et 6-7% pour l'opposition prise dans sa totalité. Selon les données du parti communiste, en Russie, il y a à présent environ 141,3 milles élus locaux, dont 7067 communistes, soit 5%. Le débat électoral risque ainsi de se réduire à une opposition Edinaya Rossiya / Parti communiste, si le parti au pouvoir ne décide pas dans certaines régions de soutenir d'autres partis pour donner une impression de pluralisme.

La réforme politique obtient ainsi l'effet escompté. Il est possible de créer des partis politiques sans problèmes majeurs, mais leurs membres ne peuvent pas participer à la vie politique, c'est-à-dire aux élections. Ils sont donc condamnés à disparaître rapidement, après avoir suffisamment désorganisé le paysage politique, dispersé les voix d'opposition, le tout profitant aux partis déjà installés, et principalement au pouvoir qui va ainsi très facilement pouvoir renforcer sa position dans les régions, tout en bénéficiant d'une certaine légitimité électorale. Il est dommage que les représentants de l'opposition et les différents organes, conseils, chambre etc n'aient pas réellement analysé les conséquences des réformes qu'ils appelaient de leurs voeux ...

lundi 25 juin 2012

La formation du Conseil des droits de l'homme et sa légitimité

Voir: http://www.gazeta.ru/politics/2012/06/22_a_4637981.shtml

La question de la formation du Conseil des droits de l'homme et de la société civile n'en finie pas de secouer l'Administration présidentielle et le Conseil lui-même. Or, la question est sensible tout autant qu'urgente. Si le Conseil perd la moitié de ses membres, le Président doit le dissoudre pour en constituer un totalement nouveau. Actuellement, il compte 27 membres et la barrière est à 20.

Comme nous l'avions déjà  précisé dans un post précédent (http://russiepolitics.blogspot.com/2012/06/lenigme-du-conseil-des-droits-de-lhomme.html), de nombreuses questions systémiques se posent. Pour revenir sur celle de la délimitation de son domaine de compétence, donc de sa différenciation tant avec les Ombudsman - pour le volet droits de l'homme - qu'avec la Chambre sociale - pour le volet société civile - l'Administration présidentielle vient de se souvenir justement du deuxième volet.

Dans le conflit montant entre celle-ci et M. Fedotov, qui avait mené des négociations dont l'Administration présidentielle ne semblait pas être informée quant à de potentielles candidatures, le pouvoir a repris la main. Arguant de la vocation de représentation sociale du Conseil, elle veut modifier le mode de composition en introduisant des mécanismes ouverts et transparents, même si de nombreuses questions sont soulevées par les aspects techniques de leur réalisation. Ainsi, les organes de la société civile auraient jusqu'au 1er juillet pour présenter des candidatures et ensuite, à compter du 1er août, tout le monde vote sur internet. Début septembre les votes sont clos et le Président choisi 13 membres parmi les 39 premiers.

Immédiatement, L. Alekseeva a annoncé sa démission si une telle procédure était retenue. Elle serait suivie, d'autres personnalités, mettant en péril le Conseil dans sa formation actuelle. L'argument avancé est qu'elle veut choisir avec qui elle travaille.

Même si la démarche de l'Administration présidentielle est largement démagogique, la réaction est surprenante. Démagogique, car, pour l'instant, aucun critère objectif, ne permet de déterminer quels sont réellement les organes de la société civile, ni combien ils sont. Ce flou laisse une marge de manoeuvre au pouvoir. Pourtant, la société civile, tout comme la société, est traversée par divers courants, certains libéraux, d'autres conservateurs. C'est ici que la réaction de L. Alekseeva est chocante. Si le Conseil représente la société civile, il doit la représenter dans son ensemble, il y va de sa légitimité. Et rejeter a priori le vote social est une manière de rejeté la société. Quand il est reproché au pouvoir de voir une opposition fréquentable, systémique, et une opposition infréquentable, ici, L. Alekseeva a la même démarche. Elle voit une partie fréquentable de la société civile et une partie non fréquentable. C'est cette impossibilité du discours, rejeté tant par certains représentants du pouvoir que par certains représentants de la société civile qui fausse le débat. Chacun parle entre soi, c'est tellement plus agréable, mais rien ne peut avancer de cette manière.

Par ailleurs, M. Fedotov l'a parfaitement souligné. Même si certains éléments pro-kremlins font leur apparition, ils seront minoritaires, ce qui n'empêchera pas le fonctionnement du Conseil.