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vendredi 16 décembre 2011

Poutine / Prokhorov: une journée politique pas très ordinaire

Il est des jours comme ça où la vie politique s'emballe, s'éclaircie ... et pourtant rien ne change. Hier fut une de ces journées. Interview marathon de V. Poutine, intervenant parfois en Premier ministre, parfois en candidat aux présidentielles. Entrée officielle de M. Prokhorov dans la course présidentielle, dont l'indépendance fait un peu grincer les dents ... mais manifestement pas au pouvoir. Et l'absence remarquable de Medvedev qui ne semble plus faire partie du tandem.

Poutine a été certes bien préparé sur la question, au combien brûlante, des manifestations. Mais s'il a réagi pondéremment dans sa première phrase préparée en louant l'activisme de la jeunesse actuelle, très vite il a dérapé. A peine sous-entendant que les étudiants étaient payés, il fallait donc bien qu'ils fassent ce pour quoi on les avait payé. Oubliant manifestement que dans le mouvement se trouvaient presque tous les représentants de la classe moyenne, les petits entrepreneurs qui en peuvent développer leur affaire à cause de la bureaucratie corrompue et des prêts impossibles à obtenir, les médecins qui voient s'effondrer le système de la médecine publique en raison d'une mauvaise gestion, d'une dégradation du professionnalisme, des files d'attente impossibles à résorber par manque de moyens, des jeunes qui s'inquiètent pour leur avenir ... Ce mouvement dirigé contre le pouvoir, n'est pas qu'un mouvement politique financé par l'Oncle Sam, comme l'affirme le Premier ministre, mais un mouvement populaire qui ne veut plus vivre comme ça plus longtemps, qui est fatigué d'attendre, fatigué de vaines promesses que personne ne se donne la peine de réellement mettre en oeuvre.

Et dans l'absence politique créée par ce mouvement, tous les chefs de file de l'opposition non systémique veulent récupérer un mouvement que, heureusement pour l'instant, ils ne maîtrisent pas. Ils veulent récupérer cette vague populaire pour enfin atteindre la popularité qu'ils n'ont pas.

Sur cet entre-fait, arrive à point nommé ... Prokhorov. Libéral, oligarque, développant un discours socialisant qui ne convaint pas encore. Très proche du pouvoir, comme tous les oligarques, c'est quand même une condition fondamentale de leur existence. Tout auréolé de son échec à Pravoe delo, qu'il a pu monté en opposition au pouvoir et en marque d'indépendance.

Et là, la conférence de presse de Poutine est éclairante: il a le soutien du pouvoir. Si Poutine, avec son humour très particulier, n'est pas allé jusqu'à lui souhaiter le succès, il a déclaré que ce sera un adversaire de qualité. Donc Prokhorov est "autorisé" à participé à la farce électorale du printemps. Mieux, il est même pressenti pour récupérer cette montée populaire.

Toutefois, le candidat Prokhorov, tout neuf en politique, ce qui le sauve, est certainement un excellent homme d'affaire, mais n'a pas encore la carrure d'un politicien ... ni d'un orateur. Ce n'est pas grave pour participer à des élections en Russie ... mais ce n'est pas suffisant pour réellement récupérer le mouvement populaire, qui se retrouve beaucoup plus dans des personnes comme Navalny - baptisé du sceau de la réelle opposition avec ses 15 jours d'arrestation "administrative" - ou Iachine.

Et les positions de Poutine et de Prokhorov ne sont pas si éloignées l'une de l'autre sur certains aspects de la vie politique qui intéressent une partie de la société, la différence n'est qu'une question de degré.

Sur la question de la libération de Khodorkovsky, Prokhorov rappelle que les décisions de justice, quelles qu'elles soient, doivent être appliquées. Poutine affirmait que la place des voleurs était en prison. Prokhorov affirme que la libération anticipée de Khodorkovsky est fondée en droit et qu'il pourrait le gracier. Poutine estime que si Khodorkovsky en fait la demande, il peut l'examiner.

Sur la question de l'élection des gouverneurs, Poutine s'est un peu emmêlé les pinceaux dans un schéma compliqué qui mèle élections directes locales, mais avec un "filtre présidentiel" qui proposerait les candidatures afin que les gentils électeurs puissent "choisir". De même pour les membres du Conseil de la Fédération - la Chambre haute du Parlement - qui pourraient être élus après un "filtre présidentiel". Il faut en effet faire attention à la montée du séparatisme, de l'extrémisme, du banditisme et autres réjouissances dans les régions .... Prokhorov se prononce également en faveur des élections directes, sans toutefois parler de filtre présidentiel.

Et Medvedev dans tout ça? Où est Medvedev? Pas une seule fois, Poutine ne l'a mentionné. Que se passe-t-il dans notre tandem? Alors, heureusement, depuis le sommet UE-Russie, une journaliste lui a demandé de se prononcer sur la position de V. Poutine quant à l'élection des gouverneurs. Et il a enfin pu rappeler qu'il était encore là et qu'il participait activement à la préparation de l'avenir de la Russie, d'autant plus que les mots prononcés par Poutine ... résultaient d'une conversation qu'ils avaient eu tous les deux quelques jours avant. Bref, il n'est pas encore parti ... pas tout à fait.

En fait rien n'a changé après cette mémorable journée politique d'hier, qui a monopolisé l'écran de télévision presque toute la journée. On sait que Poutine, malgrè le masque compréhensif, ne supporte pas ces manifestants qui remettent en cause sa sacrosainte autorité. Mais on le savait avant. On sait que Prokhorov a le soutien du pouvoir. Mais on s'en doutait avant. On sait que Medvedev est vraiment sortant. Et on ne sait toujous pas jusqu'à quel point.

jeudi 15 décembre 2011

B. Gryzlov quitte la Douma: Edinaya Rossiya doit donner l'illusion d'un changement

Борис Грызлов больше не будет спикером Государственной думы


Après huit années à la tête de la Douma, Boris Gryzlov renonce à ce poste et refuse son mandat de député. Qui le remplacera? Pour l'instant la situation n'est pas claire, les candidats ne se pressent pas.

Le 14 décembre, B. Gryzlov a déclaré qu'après deux mandats consécutifs à la tête de la Douma il quittait ce poste et ne prenait pas son mandat de député, mais restait dans l'appareil de direction d'Edinaya Rossiya.

Les candidats pour le remplacer ne sont pas nombreux, certaines sources à la Douma ou à l'Administration présidentielle avancent les noms de Alexandre Joukov ou de Sergueï Narychkine. Mais rien n'est encore confirmé.

La question est d'autant plus sensible que si Gryzlov a pu diriger une Douma où Edinaya Rossiya avait la majorité constitutionnelle, donc dans une période de tranquilité politique totale, la nouvelle configuration politique, qui ne donne que la majorité simple à Edinaya Rossiya, va obliger le nouveau président à négocier avec l'opposition.

Les manifestations post-électorales n'y sont pas non plus rien. Le pouvoir doit donner l'image d'un changement, d'une prise en considération des revendications populaires. Or, la seule idée qui ait été accolée à Gryzlov en huit année, est celle que le Parlement n'est pas un lieu de discussion. Cette position doit être radicalement modifiée pour calmer le bon peuple.

Pour l'instant, le pouvoir ne sait pas encore comment concrètement réagir, qui nommer. D'autant plus que tous les postes avaient depuis longtemps été répartis, bien avant les élections, et les derniers évènement obligent à une nouvelle répartition des cartes.

mercredi 14 décembre 2011

L'après-élections: l'enjeu de la répartition des comités à la Douma

Voir: http://www.specletter.com/politika/2011-12-13/oppozitsija-popala-v-peredelku.html

Si le LDPR a tout de suite après les élections annoncé sa satisfaction des résultats, le Parti communiste et Spravedlivaya Rossiya ont déclaré les élections illégitimes, se sont indignés contre les violations massives à la législation, les votes truqués etc. Lors de sa rencontre avec les représentants des partis représentés à la Douma, le Président Medvedev a promis que tous les recours portés contre les élections seraient analysés, toutes les preuves des manipulations examinées.

Tout le monde a été content et personne ne bouge. D’où pas de réaction brusque de la part de cette opposition institutionnalisée, à la différence de la rue qui elle n’a rien à perdre.

Mais qu’ont-ils à perdre justement, ces bons représentants du peuple ? Des places stratégiques.

Commence dès à présent le marchandage de la répartition des directions de comités et autres places importantes qui permettent d’avoir une influence sur le cours politique décidé au Kremlin ... et qui permet surtout d’obtenir certains avantages en nature, notamment un joli bureau spacieux et clair pour éviter d’être enfermé dans 5m2 avec deux assistants. L’enjeu est certes de taille.

Le budget restera à coup sûr dans les mains du parti Edinaya Rossiya, trop dangereux d’offrir un tel moyen de contrôle à l’opposition, si docile soit-elle. Mais le combat est rude autour des comités pour la défense, les affaires étrangères et la construction. En ce qui concerne la défense et la construction, les communistes arguent de l’échec de la politique d’edinaya Rossiya en ces domaines pour reprendre la main. Il serait toutefois très surprenant que le pouvoir les abandonnent, ils sont particulièrement lucratifs. Les communistes veulent également garder le contrôle du comité pour l’enseignement, qu’ils contrôlent presque de manière traditionnelle.

Il est encore difficile de dire ce qu’il en ressortira. En principe Edinaya Rossiya a la majorité et peut donc de force prendre le contrôle des comités qu’elle désire, désigner comme elle veut les vices-président et nommer aux différentes fonctions. Mais le mécontentement qui monte lui fait passer un nouveau message : il est urgent d’apprendre le compromis, la discussion et le pouvoir n’a plus la légitimité de diriger par diktat. Bref, partager pour ne pas tout perdre.

Edinaya Rossiya saura-t-elle comprendre ce message ? Bientôt la réponse. Les députés préviennent que si la réponse n’est pas satisfaisante pour les gens dans l’hémicycle, la discussion se prolongera dans la rue. Ce qui n’est pas bon pour l’Etat.

mardi 13 décembre 2011

Une nouvelle opération Prokhorov?




Les manifestations de samedi dans de nombreuses villes de Russie, le mécontentement ouvertement affiché de la population envers le pouvoir, l'absence d'un leader qui pourrait canaliser et faire "fructifier" ce mouvement populaire est en train de produire ses premiers effets.

Pour le pouvoir, un moment d'angoisse: comment canaliser ce mécontentement et l'utiliser? Pour les politiques: comment rentabiliser ce mouvement de foule et profiter de ce moment unique pour mettre en place un mouvement politique de la classe moyenne?

En d'autres termes: Prokhorov contre Koudrine? Prokhorov contre Poutine? Poutine contre Prokhorov et Koudrine?

Une inconnue: en dehors des schémas montés par ces particpants, la population arrivera-t-elle à garder le contrôle de son mouvement et à le transformer en une force d'action positive? Ou bien le mouvement sera-t-il récupéré par les joueurs traditionnels de l'échiquier politique - et peu importe lequel alors ?

Comme le remarquent les analystes, en ce qui concerne Prokhorov, bientôt les choses seront claires. Rappelons qu'aucun candidat non-kremlin n'a jamais pu enregistrer sa candidature aux présidentielles, soit pour des raisons techniques, soit parce qu'il n'a pu réunir les 2 millions de signatures nécessaires.

Hier, lors de sa conférence de presse, M. Prokhorov a annoncé sa volonté de participer aux présidentielles. Ces derniers mois, son staff aurait réussi à réunir les signatures demandées. Ils seraient en mesure de déposer sa demande officielle mercredi ou jeudi auprès de la Commission centrale électorale. Mais il ne donne aucune autre information concernant la composition de son staff électoral, de la liste de ses membres, de son programme ...

Pour les analystes, la situation sera alors claire: si sa candidature est enregistrée, il bénéficie du soutien du Kremlin, bien que niant avoir eu toute discussion avec Poutine ou Medvedev; si sa candidature n'est pas enregistrée, il agit réellement de manière indépendante et aura au moins eu la possibilité de laver son image après l'échec de sa direction du parti Pravoe delo.

En tant qu'indépendant, il a peu de chances. Toutefois, la situation politique se complique après les manifestations. Quelqu'un doit prendre en charge le mécontentement et répondre aux attentes politiques d'une population de plus en plus déçue par les partis institués. D'où l'idée de Koudrine d'une nouveau parti de droite. D'où l'annonce de Prokhorov. Même s'il est enregistré, il ne sera d'aucun danger pour Poutine, mais permettra de redonner de l'oxygène dans une vie politique au bord de la fossilisation.

S'il est officieusement lancé par le Kremlin, qui évidemment jamais ne le reconnaîtra, l'enregistrement de sa candidature ne posera pas de problèmes. Il apparaît même alors, dans le jeu intérieur, comme une alternative à l'échec de l'opération "Medvedev - grand libéral - aimé du bon peuple". En ce qui concerne le libéralisme, il n'est visible que pour une catégorie très précise de la société, quant à l'amour populaire, il suffit d'aller sur sa page Facebook et de lire les commentaires pour en avoir froid dans le dos. Comment le dirigeant d'un pays peut-il s'abaisser à ce point là?

Et là, Prokhorov devient une alternative libérale neuve. Un premier ministrable à la place d'un Medvedev en échec.

La question, qui n'a rien à voir avec les élections, reste pourtant de savoir si le Pouvoir a plus à perdre avec le maintien de Medvedev ou avec son départ.

Et la question qui a tout à voir avec les élections est de savoir si la population acceptera de se faire si facilement manipuler? Les dernières évolutions laissent perplexes ... et plein d'espoirs!

lundi 12 décembre 2011

La société civile s'organise pour défendre le droit des citoyens à manifester

Voir: http://vprave.org/index.php/Novosti/Novosti-o-pravah/Vybory-2011-sozdan-shtab-pravovoy-pomoschi.html

Si la manfestation de samedi s'est passée dans le calme à Moscou, ce ne fut pas le cas des manifestations précédentes, où près d'un millier de personnes ont été arrêtées en Russie depuis la fin des opérations électorales.

En réaction - et en prévention - plusieurs associations ont décidés de mettre en place une plateforme commune permettant d'expliquer aux gens la réalité de leur droit à manifester, droit constitutionnel et fondamental de tout être humain. Il s'agit du Fond "Obchestvenny verdict", du centre de défense des droits "Memorial", de la branche moscovite du groupe Helsinsky, de l'association "Agora", du comité contre la torture, du centre de coopération de défense internationale et de juristes et avocats particuliers.

En dehors d'une activité de prévention, cette structure est prête à apporter son aide en cas d'arrestation illégale, de mauvais traitements au cours de la rétention et autres faits habituels dans ce type de cas.

La société civile semble déterminée à ne pas conclure le mouvement de protestation avec la manifestation spectaculaire de samedi. On rappellera qu'une autre manifestation est prévue pour le 24 décembre. Pour l'instant, le pouvoir ne sait pas comment réagir et "fait le dos rond", attendant que la situation se calme d'elle-même. Dans la perspective des présidentielles de mars, où les gens ne voient pas avec le sourire au coeur le retour de Poutine pour 12 ans, cette structure risque en effet de ne pas manquer de travail. Espérons toutefois que la société civile arrivera aussi à formuler un projet politique positif pour la société.

Le retour de Koudrine: un nouveau leader pour l'opposition russe?

Алексей Кудрин думает заняться партией правого толка


Selon A. Koudrine, l'émergence d'un réel projet de droite doit être le principal résultat des élections législatives du 4 décembre. Et dans l'interview qu'il a donné à Vedomosti, il est prêt à participer à la création de ce nouveau projet politique de droite.

Au début de l'année, le pouvoir lui avait proposé de prendre la direction du parti Pravoe delo. Mais Koudrine avait refusé en raison de la dépendance trop forte de ce projet avec le Kremlin.

Il n'explique pas pour l'instant comment fonder un parti en s'appuyant sur le mécontentement populaire issu des dernières élections. En revanche, il fait comprendre que sa ressource principale est la consolidation des forces libérales et démocratiques du pays et affirme avoir déjà contacté à ce sujet l'ancien leader de Pravoe delo, M. Prokhorov. Mais celui-ci ne confirme pas, son entourage précisant seulement que Prokhorov n'a pas encore décidé de collaborer avec Koudrine.

Selon les sources du Kremlin, il ne s'agirait que d'un projet personnel de Koudrine. Mais Koudrine reste un homme du système avec une grande expérience des affaires d'Etat. Dans le nouveau paysage politique, Poutine pourrait avoir, à travers Koudrine, une opposition loyale, mais pas de poche. D'un autre côté, pour l'instant le pouvoir ne sait pas comment réagir avec la montée des protestations, dont l'ampleur l'a pris de court.

Selon l'ancien leader du SPS, l'actuel gouverneur N. Belykh, le système politique aujourd'hui peut évoluer de manière aussi rapide qu'imprévisible. Et Koudrine est l'un des rares hommes politiques russes actuels à pouvoir regrouper les forces politiques libérales, en construisant une plateforme constructive qui s'appuie sur l'énergie des masses.

Toutefois, selon le politologue M. Vinogradov, le mouvement de protestation actuel est plus profond qu'une simple remise en cause des élections, c'est un mouvement anti-Poutine. Et il y a peu de chances que la masse adopte Koudrine comme figure de remplacement.

Les projets de droite ont toujours été un échec. L'opposition n'a pas de leader charismatique sérieux qui puisse fédérer les masses et porter un projet électoral. Le personnalité de Koudrine a le double intérêt de la compétence et de l'expérience. Ce pourrait être un premier pas fort pour normaliser la vie politique. Mais obtiendra-t-il le soutien populaire nécessaire à son indépendance du Kremlin?